LE PRISONNIER
C'est un prisonnier
Qui demande des chaînes
Des chaînes de télévision
Pour s'évader
Pour voir pousser des fleurs
Des fleurs sur le canal
Le canal numérique.
C'est un prisonnier
Qui regarde une fille
Elle chante la météo
Devant une carte du pays
De son pays
Une façon comme une autre
De passer le temps.
C'est un prisonnier
Qui joue avec un autre
Un autre détenu
Avec un dé
Un dé tenu
Lancé
Pour un pari lancé
Tenu :
Quatre-cent-vingt-et-un !
Perdu gagné perdu.
C'est un prisonnier
Qui a fait les quatre cent coups
Les quatre cent mauvais coups
Des coups de mains
Des hauts les mains
Des bas les pattes
Et maintenant
Il tourne ses pouces
La vie lui a dit pouce
Il pense au temps passé
Il a tout le temps
D'y penser
Demain sera un autre jour
Un autre jour
Le même.
C'est un prisonnier
Qui regarde un nuage
Un nuage de lait
Dans son bol de café
Noir
C'est donc le matin
A midi il regarde les yeux
Blancs
Les yeux de la pomme
La pomme de terre
En robe de chambre
Et il se rappelle
Son arrière-grand-mère
Qui est tout en haut de l'arbre
L'arbre généalogique de famille
Et lui il est tout en bas
Plus bas que terre
Entre quatre murs
Dans l'antichambre du cercueil
Et déjà il fait nuit
C'est la sonnerie
Qui le crie
Dans le bol la soupe sera
Rouge ou verte
Selon la saison.
C'est un prisonnier
Qui dessine avec une craie
Blanche
Des petits barreaux
Sur les murs
Gris
Un petit barreau par jour
C'est assez
Et le reste du temps
Il regarde ses chaînes
Les chaînes de télévision
Des chaînes qu'il se paye
En tressant des paniers
En osier
Les jours où la neige est
Dedans le poste.
(Mai 1997.)
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